L’écrevisse : un crustacé menacé de nos rivières, son habitat et ses défis

L’écrevisse, un petit crustacé d’eau douce, a longtemps été un habitant omniprésent de nos rivières et lacs. Pourtant, au fil des décennies, son habitat naturel a été profondément bouleversé, mettant en péril plusieurs espèces autochtones. Bien qu’elle soit discrète, l’écrevisse joue un rôle crucial dans l’écosystème aquatique. Dans cet article, nous vous invitons à découvrir cet animal fascinant, à comprendre ses habitudes, ses défis, et à explorer les mesures prises pour le préserver.

Portrait de l’écrevisse : un mini-crustacé à dix pattes

L’écrevisse est un décapode, ce qui signifie qu’elle possède dix pattes. Elle se distingue par ses pinces robustes et son thorax imposant, rappelant un homard miniature. Ce petit crustacé mesure généralement entre 4 et 20 cm, mais certaines espèces peuvent dépasser cette taille.

L'écrevisse, le crustacé presque disparu de nos rivières. Comment et où vit-il ?Crédit photo : David Gerke

En France, on recense environ neuf espèces d’écrevisses, parmi lesquelles on distingue deux grandes catégories : les écrevisses autochtones (présentes naturellement sur le territoire) et les écrevisses allochtones (introduites par l’homme, volontairement ou non).

Les espèces d’écrevisses autochtones :

  1. Écrevisse à pieds blancs
  2. Écrevisse à pattes rouges
  3. Écrevisse des torrents

Les espèces d’écrevisses allochtones :

  1. Écrevisse du Pacifique
  2. Écrevisse américaine
  3. Écrevisse de Louisiane
  4. Écrevisse à pattes grêles
  5. Écrevisse juvénile
  6. Écrevisse calicot

Ces variétés exotiques, introduites dans les cours d’eau français, ont souvent provoqué des déséquilibres écologiques importants en raison de leur compétitivité et de leur résistance aux maladies, notamment l’aphanomycose (peste de l’écrevisse).

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Un habitat spécifique : où vivent les écrevisses ?

Les écrevisses préfèrent les eaux claires et bien oxygénées, avec des fonds fermes et peu envahis par la végétation. Elles se trouvent généralement dans des rivières, lacs, étangs ou canaux, et affectionnent particulièrement les rives escarpées, où elles creusent de petits trous pour se cacher. Ces cachettes, souvent sous des souches, pierres ou racines, leur servent de refuge en cas de danger.

L’écrevisse possède une particularité surprenante : bien qu’elle soit un animal aquatique, elle peut aussi parcourir de longues distances sur terre, transportant de l’eau dans ses branchies pour respirer, à la recherche d’un meilleur habitat. Cette capacité lui permet de migrer si son environnement devient trop hostile ou manque de ressources.

Une alimentation diversifiée mais principalement détritivore

Les écrevisses sont des omnivores avec une préférence pour les débris végétaux et animaux. Elles se nourrissent principalement la nuit, en quête de larves d’insectes, de mollusques, d’œufs de poissons et de tout autre reste organique qui pourrait se trouver dans leur habitat. Les feuilles mortes, les petites algues, les racines de plantes aquatiques et même les cadavres de poissons font également partie de leur menu.

Curieusement, certaines espèces comme l’écrevisse américaine continuent de s’alimenter même en hiver, une période où les écrevisses autochtones jeûnent généralement.

La mue : un processus indispensable à la croissance

Comme la plupart des crustacés, l’écrevisse est protégée par un exosquelette dur. Cependant, cet exosquelette ne grandit pas avec elle, ce qui la contraint à mu(e)r régulièrement. Lors de la mue, l’écrevisse perd sa carapace et devient extrêmement vulnérable. C’est pourquoi elle se cache jusqu’à ce que sa nouvelle carapace durcisse, un processus qui peut prendre jusqu’à 10 jours.

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Durant cette période, l’écrevisse se nourrit souvent de son ancien exosquelette, riche en calcium, pour renforcer sa nouvelle carapace. À l’âge adulte, les mâles muent généralement deux fois par an, contre une seule fois pour les femelles.

La reproduction des écrevisses : un cycle fragile

La reproduction des écrevisses a lieu généralement en automne, lorsque la température de l’eau descend en dessous de 10°C. Le mâle possède des pattes modifiées qui lui permettent de féconder la femelle, laquelle pond ensuite entre 60 et 150 œufs. Cependant, certaines espèces comme l’écrevisse à pattes grêles peuvent pondre jusqu’à 500 œufs.

Les œufs incubent pendant 6 à 9 mois en fonction de la température de l’eau. À l’éclosion, les jeunes écrevisses restent accrochées à l’abdomen de leur mère pendant environ deux semaines, avant de se détacher et de commencer à nager de manière autonome. Cette période est cruciale pour leur survie, car elles sont extrêmement vulnérables aux prédateurs et aux conditions environnementales.

Les prédateurs : une menace constante pour les écrevisses

Les écrevisses ont de nombreux prédateurs dans leur environnement naturel. Les poissons tels que les carpes et les brochets, mais aussi les oiseaux aquatiques comme le héron et certains mammifères tels que la loutre et le ragondin, sont friands de ce petit crustacé. Sans oublier les hommes, qui apprécient la délicatesse de leur chair.

Mais les écrevisses doivent également se méfier de leurs congénères, car elles sont cannibales, particulièrement pendant les périodes de mue où elles sont plus vulnérables.

Une population en déclin : les causes de la raréfaction des écrevisses

Depuis la fin du XIXe siècle, la population d’écrevisses en France a connu une importante régression. Plusieurs facteurs expliquent ce déclin :

  1. La peste de l’écrevisse (aphanomycose) : Cette maladie, causée par un champignon, a décimé de nombreuses populations autochtones. Les écrevisses allochtones, notamment américaines, sont des porteurs sains de cette maladie, contribuant à sa propagation.
  2. Les espèces invasives : Les écrevisses exotiques, introduites en Europe, ont souvent un avantage compétitif sur les espèces locales. Elles se reproduisent plus rapidement et sont moins sensibles aux maladies locales.
  3. La dégradation des habitats : La pollution des cours d’eau, la construction de barrages et d’autres infrastructures humaines ont perturbé les écosystèmes aquatiques, réduisant les zones propices à la survie des écrevisses.
  4. La qualité de l’eau : La pollution et les changements de qualité de l’eau ont aussi un impact direct sur la santé des populations d’écrevisses.
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Les efforts de protection et de régulation

Face à cette situation alarmante, des mesures de protection ont été mises en place. En France, un arrêté a été pris le 21 juillet 1983 pour protéger les espèces autochtones et leur habitat. Cet arrêté limite notamment la pêche des écrevisses autochtones et impose des règles strictes pour éviter l’introduction d’espèces allochtones dans les milieux naturels.

L’Office National de l’Eau et des Milieux Aquatiques (Onema) travaille activement avec des chercheurs pour comprendre et contrôler l’invasion des espèces exotiques, tout en luttant contre le braconnage des écrevisses natives.

En parallèle, des actions européennes ont été initiées. En 2016, l’Europe a publié une liste de 37 espèces invasives que les États membres doivent contrôler. Parmi ces espèces figurent les écrevisses américaines, de Louisiane et de Californie.

Conclusion : l’avenir des écrevisses dans nos rivières

Bien que les écrevisses autochtones soient en danger, les efforts de protection et de régulation permettent d’espérer un avenir meilleur pour ces petits crustacés. Leur rôle écologique est crucial, et il est important de continuer à sensibiliser le public sur l’importance de leur préservation.

Si vous avez un cours d’eau ou un plan d’eau près de chez vous, prenez le temps d’observer ces petites créatures et leur environnement. Participez à leur protection en veillant à ne pas perturber leur habitat et en respectant les réglementations locales concernant la pêche et l’introduction d’espèces non natives. Ensemble, nous pouvons contribuer à la survie des écrevisses dans nos écosystèmes aquatiques.

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Avez-vous déjà observé des écrevisses dans leur habitat naturel ? Quelles sont vos expériences ou vos questions à leur sujet ? N’hésitez pas à partager vos réflexions et à enrichir la discussion.